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Le cardinal Maurice E. Piat : « Notre avenir à tous est en jeu. Il faut arriver à s’écouter, à réfléchir ensemble »

Le cardinal Maurice E. Piat s’est prêté aux questions de Martine Théodore-Lajoie, de La Vie Catholique. Il fait une relecture de 2020 et propose entre autres, deux pistes pour 2021. Perpétuer la solidarité et l’union « des femmes et des hommes d’expérience et de sagesse pour réfléchir sérieusement à la façon dont notre pays pourrait rebondir ».

 

Beaucoup de personnes attendent la fin de 2020 tant elle a été, pour certains, synonyme de souffrance, de peur. De votre côté, quel regard portez-vous sur cette année qui s’achève ?

 

L’année 2020 a été vraiment l’année d’une grande épreuve pour chacun de nous, pour nos familles, pour notre pays, pour le monde. Nous avons cherché à vivre ce temps difficile le mieux possible, à la fois pour nous protéger de la maladie et pour vivre une solidarité avec ceux qui souffraient davantage. Mais plus on avançait dans l’année, plus les choses se compliquaient, surtout du point de vue économique, ce qui aura des conséquences graves, non seulement pour le pays dans son ensemble, mais pour chacune de nos familles. La fin de 2020 ne marquera certainement pas la fin de l’épreuve que représente pour nous la pandémie de la Covid-19. C’est vrai que c’est difficile de vivre avec l’incertitude et de ne pas savoir quand cette période difficile pourrait se terminer. Il me semble qu’une bonne attitude serait d’apprendre à vivre en se concentrant sur le moment présent, à apprécier toutes les petites joies, les petits bonheurs qui sont là et que souvent nous négligeons dans l’attente d’une fin de tracas qui finalement recule toujours à l’horizon.

 

Quelles leçons pouvons-nous en tirer ?

 

Il est vrai que depuis 30 ou 40 ans, l’île Maurice a vécu une période de prospérité grandissante. Nous nous sommes habitués, chacun à son niveau, à un certain confort, un certain bien-être que nous croyions solides, bien ancrés et acquis pour de bon. Or, nous nous rendons compte de la grande vulnérabilité de notre économie et de la fragilité de nos sources de revenus. Peut-être qu’il serait sage d’apprendre à vivre plus sobrement et à faire l’expérience concrète qu’on peut être heureux dans une vie simple.

 

Vous aviez invité à un Noël solidaire. Votre appel a été bien entendu. Notamment dans les paroisses où le temps de l’Avent a été jalonné d’initiatives solidaires. Comment accueillez-vous ce bilan ?

 

Je suis très heureux de voir toute cette créativité se déployer à partir des paroisses. Il y a eu des initiatives inédites comme les bazars de Noël ou la formation des entrepreneurs, entre autres. Comme quoi, un peu comme durant un cyclone, le choc inattendu de la Covid-19 a réveillé ce qu’il y avait de meilleur dans beaucoup de personnes. Il est beau aussi de voir que cette solidarité au ras des pâquerettes est source de grande joie. Je remercie les prêtres des paroisses, leurs collaborateurs et les groupes et ONG qui ont participé à ce grand élan de solidarité. Dieu veuille que cela soit non seulement un achievement isolé qu’on applaudit, mais le début d’une nouvelle manière de vivre.

 

Justement, l’élan de solidarité risque néanmoins de s’essouffler au fil des semaines et des mois. Comment maintenir cette solidarité ?

 

C’est vrai que quand on fait appel à la solidarité, il y a souvent une réponse spontanée et généreuse. Mais elle a tendance quelquefois à être feu de paille. Nous avons tous de la difficulté à tenir la distance. Où chercher ce souffle qui nous permet de durer ? Il me semble qu’il y a deux sources principales qui peuvent maintenir vivant l’élan de solidarité en nous. La première, c’est de ne pas faire tout seul, mais en groupe, en équipes, se soutenir fraternellement lorsqu’on rencontre des difficultés inévitables, pouvoir évaluer le chemin parcouru, en tirer les leçons pour repartir de manière toujours plus adaptée. Une deuxième source est la fréquentation de la Parole de Dieu, où nous sommes invités à contempler la façon dont Jésus lui-même a vécu et a duré dans cette solidarité, même au cœur des pires épreuves. Je profite de l’occasion pour inviter les chrétiens à prendre ou à reprendre l’habitude de lire ensemble l’Évangile, en petits groupes de voisins, d’amis, de collègues. Cela paraît simple, de petite importance, mais il y a là une vraie source de courage et de joie pour tenir ensemble la distance.

 

Certaines personnes ont hâte de voir 2021. D’autres ont peur, se demandant si la nouvelle année ne sera pas pire que la précédente. En tant que pasteur, quel message avez-vous pour eux ?

 

En pleine pandémie, le passage d’une année à l’autre que nous avons l’habitude de célébrer joyeusement et bruyamment passe au second plan. Il me semble qu’il y a d’autres passages à faire pour vivre de mieux en mieux ce temps où nous sommes. Par exemple, le passage à une vie plus simple mais tout aussi joyeuse en famille, entre amis. Le passage aussi à des loisirs plus sains et plus organisés pour les jeunes. Le passage peut-être à une vie de foi qui ne se contente pas de la pratique dominicale, mais qui se nourrit davantage de l’écoute de la Parole de Dieu. Car la Parole résonne avec d’autant plus de pertinence en ces temps difficiles. Je remercie tous ceux qui font preuve de créativité pour nous aider à écouter la Parole à travers les médias, sur les réseaux sociaux, etc.

 

On ne peut occulter les nombreuses difficultés que le pays a rencontrées en 2020. Que souhaitez-vous à l’île Maurice pour 2021 ?

 

Notre pays traverse un des moments les plus difficiles de son histoire. Certains l’ont comparé à la situation dramatique des années avant l’Indépendance ou à la fin des années 70. Notre économie va mal et les perspectives ne sont pas brillantes. Il me semble urgent que des femmes et des hommes d’expérience et de sagesse de ce pays, de tous bords et de toutes communautés, puissent se rencontrer avec les autorités pour réfléchir sérieusement à la façon dont notre pays pourrait rebondir. Cela s’est fait dans le passé et a porté beaucoup de fruit. Notre avenir à tous est en jeu. Il faut arriver à s’écouter, à réfléchir ensemble, à évoquer toutes les hypothèses possibles et surtout, surtout, chercher l’intérêt commun du pays et non pas nos intérêts personnels, qu’ils soient économiques ou politiques. Je sais que ce n’est pas simple, mais c’est justement parce que c’est compliqué et difficile que c’est un devoir de mettre la tête ensemble. C’est mon souhait le plus cher pour mon pays en 2021.

 

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