« J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger, j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire ». Ces paroles ont résonné avec force dans la vie de Robert, non seulement dans ce qu’il a fait ou réalisé, mais dans sa manière d’être. On sentait que cette parole non seulement l’inspirait, le guidait dans tout ce qu’il a fait pour les pauvres mais qu’elle était à la source de sa joie de vivre, de son espérance. Et aujourd’hui il reçoit cette autre parole « viens béni de mon Père, reçois en héritage le Royaume ».
Robert a été un homme chaleureux fraternel, un confrère accueillant, un bon vivant qui aimait recevoir ses confrères, ses collaborateurs. Il était aussi un vrai compagnon de route pour les jeunes qu’il formait dans l’IDP, dans l’Association des Pêcheurs professionnels, dans la JOC, dans Caritas, un prêtre très proche des gens. On se souvient encore de lui arpentant les petites rues de Roche-Bois, s’arrêtant dans une famille, puis dans une autre, faisant ainsi le tour de la paroisse. Quand on le remerciait d’être venu, il répondait « c’est moi qui vine apprane cot zot ».
Dans son ministère il a su à la fois s’engager à fond comme éducateur dans des services spécialisés comme l’IDP, Caritas, la JOC, l’Association des Pêcheurs, l’Apostolat de la Mer et en même temps rester prêtre de paroisse au service du peuple qui lui était confié. Sa pédagogie audio-visuelle était élaborée à l’époque de manière artisanale avec l’aide de Laurence Piat pour s’adapter par exemple à des pêcheurs qui souvent ne savaient pas lire. Il a ainsi beaucoup contribué à conscientiser ces pêcheurs afin qu’ils se libèrent de l’emprise des intermédiaires dans la vente de leurs poissons et puissent retrouver leur indépendance et leur dignité.
Parmi les premiers prêtres, avec Mgr Denis Wiehe, à être ordonné par Mgr Margéot, le 17 août 1969, il est envoyé peu de temps après à Claver House à Londres pour des études en sociologie et ce qu’on appellerait aujourd’hui le Développement Humain Intégral. A son retour il a beaucoup travaillé non seulement avec l’IDP mais avec Caritas Ile Maurice qui avait été fondée quelques années auparavant. C’est lui, entre autres, avec Mgr Nagapen, qui insuffle dans Caritas au-delà de l’aide matérielle cette dimension de l’accompagnement des personnes sur le chemin de leur développement humain.
En tant qu’aumônier de Caritas et membre du Conseil d’Administration, il contribue à former plusieurs jeunes qui, à l’époque, faisaient leur premier pas dans Caritas : des jeunes comme Cursley Goindoorajoo, Patricia Adèle et d’autres qui aujourd’hui, en poste de responsabilité à Caritas ont contribué à donner à cet organisme l’essor que nous lui connaissons.
Robert a aussi été très proche des jeunes, surtout à la JOC dont il a été l’aumônier pendant de longues années. Il encourageait les études de tous ceux et celles qui s’intéressaient mais n’avaient pas toujours les moyens. Il trouvait des sponsors pour payer leur scolarité, leur frais d’examen, il les aidait personnellement dans leurs études, leur inculquait une méthode de travail. Plusieurs d’entre eux parlent de lui aujourd’hui comme de leur « mentor ».
Robert s’est aussi beaucoup intéressé aux petites îles de la République, Agaléga et Rodrigues. Il adorait se rendre à Agaléga où il était à l’aise avec les pêcheurs, et aimait donner aux gens de bonnes recettes de cuisines – spécialement comment utiliser le coco quand on n’a pas beaucoup de légumes. A Rodrigues il a beaucoup travaillé dans le cadre de Caritas et a fait plusieurs voyages sur l’île avant d’y être nommé curé à St Gabriel, qui fut la dernière paroisse où il a servi – un lieu où il a beaucoup touché les gens par sa proximité, et sa joie de vivre. Beaucoup de Rodriguais appellent depuis hier pour dire leur sympathie et leur reconnaissance.
Mais au-delà des petites îles, Robert a aussi navigué plus large dans l’océan Indien, en tant que coordonnateur régional de Caritas. Et a ce titre, il a aussi beaucoup voyagé en Afrique où dans certains pays on faisait appel à lui pour des sessions de formation pour les pêcheurs professionnels.
Nous rendons grâce à Dieu de nous avoir donné en Robert notre frère, un témoin si fort, si joyeux de cette bonne nouvelle que nous sommes tous appelés à annoncer aux pauvres. Les dernières années de sa vie il a été bien diminué par sa maladie qui le paralysait de plus en plus. Vers la fin nous ne pouvions plus communiquer avec lui que par les yeux, ou par un sourire. Mais son regard qui s’illuminait en signe d’accueil quand on allait lui rendre visite, restera toujours dans nos mémoires comme un « au revoir » plein d’espérance avant d’entrer avec « les bénis du Père dans ce Royaume préparé pour eux depuis la fondation du monde ».