« Mon âme a soif du Dieu vivant, quand le verrai-je face à face ? » C’est le refrain du psaume que la liturgie nous proposa ce 4 mars où nous avons célébré l’eucharistie en communauté autour du lit de Régis. En soins palliatifs à Bethesda (Maison des Pères âgés du diocèse), il avait reçu ce jour-là le sacrement des malades. Le cancer se généralisait. Onze jours après, il rejoignait le Seigneur des vivants.
Né en 1945 à Maurice, dans une famille de dix enfants, Régis termine ses études secondaires dans un Technical Institute, d’où il sort à 18 ans avec un Royal Society of Arts School Certificate. Il s’embauche comme employé de commerce, mais bientôt rejoint un de ses frères établi à Hong-Kong. C’est là qu’il rencontre les Jésuites (lui qui habitait à deux pas de la Résidence St Ignace à Rose-Hill !). Guidé par le P. Georges Germain, jésuite français, il entre au Noviciat en février 1967, puis est envoyé à Taïwan afin de continuer sa formation. Ce seront d’abord trois années d’intensif apprentissage du mandarin au Chinese Language Institute, puis l’itinéraire classique en philosophie et théologie ; avant d’être ordonné prêtre à Taïpei le 31 juillet 1978.
Régis commence son Troisième An l’année suivante, et à la fin (avril 1980) il est orienté vers les Philippines, où il va rester 24 ans. Après deux ans d’étude à l’East Asian Pastoral Institute de l’Université Ateneo de Manille, il sera éducateur en langue chinoise à la Sacred Heart School de Cebu durant quatre années. Puis dix-huit ans à la Paroisse du Sacré-Cœur. « Durant toutes ces années, vous aidez les âmes avec ferveur et servez fidèlement le peuple de Dieu qui vous est confié, spécialement la communauté chinoise » écrit le P. Général dans sa lettre à Régis pour son Jubilé de Vie religieuse. En 2004, une autre demande lui parvient : revenir dans son pays pour prendre en charge la communauté sino-mauricienne.
Cette mission durera trois ans. Ensuite, il devient vicaire en paroisse, d’abord à Beau-Bassin (sa ville natale), puis à Rose-Hill. À la Résidence St-Ignace, il reçoit de très nombreuses personnes en entretiens et confessions. « Discret comme le sont vos chats » écrit le P. Général (!), Régis accomplit de fait toutes ces missions avec une simplicité sans tapage, gardant néanmoins dans sa prière le soin fidèle des âmes qui lui sont confiées. Il est le serviteur assidu de la réconciliation des cœurs et de la joie de l’Évangile.
Vint le temps du Covid. Ce qui a secoué durement les sociétés et les personnes n’a pas épargné Régis. La politique de prévention se met en place ; deux confinements stricts sont décrétés, en 2020 et 2021. Régis ne souhaite pas être vacciné. Il sera éprouvé également par le décès de sa sœur ainée, à laquelle il était très attaché. En mai 2022, sa santé donne des signes d’inquiétude, qui nécessite un long passage dans le secteur médicalisé de Bethesda. Puis il revient à la Résidence, mais ne peut tenir les permanences d’écoute comme avant. Un examen détecte un cancer de la vésicule biliaire, en train de migrer sur le foie.
Ni une opération ni même une chimio ne peuvent être tentées. C’est dans une humble remise de soi que Régis aborde ce dernier moment de son existence. Peu de paroles, une économie de gestes, mais il demeure présent à sa situation. Sans plainte, il accueille silencieusement ceux qui viennent le visiter. Dix jours avant son anniversaire, le Seigneur l’a comblé de sa paix.
Patrice de La Salle