Dans le cadre des réactions à la mort du Pape François le 21 avril 2025, nous vous proposons le témoignage de Jean-Luc Mootoosamy, journaliste mauricien et suisse, qui a suivi le Saint-Père lors de quatre voyages apostoliques, dont celui qui l’a mené à Maurice pendant 8 heures en septembre 2019. Jean-Luc Mootoosamy est actuellement à Rome, au Vatican, pour couvrir les obsèques du Pape François pour la Mauritius Broadcasting Corporation.
L'Ultimo Viaggio, Le Dernier Voyage
« Patris, et Filii et Spiritus Santi [Père et Fils et Saint Esprit] Amen » : vos derniers mots publics ce dimanche 20 avril 2025 auront été une bénédiction Urbi et Orbi. Et vous vous êtes même permis une sortie en papamobile déclenchant une joie débordante sur la Place Saint Pierre, jusque sur la via della Conciliazione, face à la basilique. Vous faisiez, en fait, vos adieux, Saint-Père. A la joie de Pâques quelques heures plus tard, s’est imposée la tristesse de votre départ.
Dès votre élection, vous aviez conscience de votre santé fragile. En 2014, quelques mois après votre première apparition à la loggia des bénédictions, dans l’avion vous ramenant de Corée du Sud, vous estimiez la durée de votre pontificat à « deux ou trois ans ». Et dans un immense sourire, nous ajoutiez « ensuite en route pour la Maison du Père ! ». Saint-Père, vous avez été pape pendant 12 ans. Et après 47 voyages apostoliques alors que vous entamez ce dernier voyage, vers la Maison du Père, l’ultimo viaggio, permettez-moi ces lignes pour exprimer mon immense tristesse et de ma toute aussi immense et éternelle gratitude.
Je me suis senti très proche de vous, Saint-Père. J’ose vous considérer comme « mon pape », celui que j’ai connu, avec qui j’ai marché non pas une fois mais quatre fois ! Car aussi incroyable que cela puisse encore me paraître, à moi enfant de Rose-Hill, mon métier m’a permis d’être un de vos compagnons. Avoir fait partie de votre joyeuse caravane, avoir pu vous parler, vous confier les souffrances de tant de personnes croisées sur ma route, a été un moment d’exception de ma carrière. Et savoir que j’étais le seul journaliste africain externe au Vatican, régulièrement accrédité, a été un honneur.
Avec vous, j’ai vécu des moments d’exceptions, intenses. Vous avez fait sourire, illuminé de joie le visage de peuples en souffrance. Vous avez fait pleurer de bonheur des personnes en quête d’espérance. En novembre 2025, vous avez bravé les armes en République centrafricaine, circulant dans Bangui à bord d’un véhicule sans vitre pare-balles, allant jusqu’au quartier fermé du Kilomètre 5 pour appeler à la paix. En République démocratique du Congo, vous avez dénoncé le « colonialisme économique », « tout aussi asservissant » que le « colonialisme politique ». « Ôtez vos mains de l’Afrique ! » avez-vous insisté – un message à ceux qui pensent pouvoir continuer à piller ce continent impunément.
« Guérir les blessures de notre humanité »
Et puis il y a eu nos échanges, votre regard pétillant quand j’ai placé un chapeau de Rodrigues sur votre tête, votre écoute lorsque vous avez écouté la voix de ma fille, Mahalia, vous raconter la triste histoire de Joseph, enfant « sorcier », aujourd’hui adulte et toujours rejeté. En août 2023, vous m’avez dit deux fois que vous prieriez pour la guérison de Thierry Murday, Mauricien dans le coma victime d’un accident en Espagne en route vers les Journées Mondiales de la Jeunesse de Lisbonne. Thierry est hors du coma, sera à jamais reconnaissant pour votre soutien. Et pour mon métier, je retiens ce que vous nous disiez en janvier dernier lors du Jubilé de la Communication en janvier 2025. Face aux « conquêtes vertigineuses de la technologie » vous invitiez les journalistes et communicants à « prendre soin de [leur] cœur », de leur « vie intérieure », avec quelques pistes :
Santo Padre, Saint Père, je tâcherai de poursuivre dans cette tradition d’un journalisme soucieux de la dignité de l’autre, de demeurer un pèlerin d’espérance.
Pour ce dernier voyage, je vous regarde partir. Pas de caravane, vous partez seul. Et comme vous le faites à chaque fois, vos départs se font après un passage à la Basilique Papale de Sainte Marie Majeure de Rome.
Merci d’avoir été le Pape des petits, des invisibles de notre monde. S’il vous plaît, de la « Maison du Père », continuez à prier pour nous.
Grazie Santo Padre, Buon Viaggio !
Jean-Luc Mootoosamy
Event Date:
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Lundi à vendredi
08h00 à 16h00
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